Jouer avec les taux d’intérêts, inonder les marchés de liquidités, acheter les titres de dettes publiques grâce au fameux quantitative easing : il aura tout essayé. Déployer sa boite à outils de manière très risquée et sans succès ne lui a pas suffi, Mario Draghi, président de la Banque Centrale Européenne, a annoncé le 21 janvier 2016 à la plus grande stupeur de tous : « Nous pouvons agir sans limite ». Le président est prêt à tout pour relancer la dynamique de l’économie européenne. Ses dernières mesures ont été de baisser les trois taux directeurs : le taux principal, le taux de prêt marginal et le taux de dépôts, ce qui incite les banques à se refinancer et à faire circuler leurs liquidités. La BCE a également annoncé le lancement de quatre nouveaux TLTRO, prêts de long terme réservés aux banques de la zone euro qui prêtent à l’économie, ainsi que l’augmentation du quantitative easing de 20 milliards d’euros par mois. Mais le taux d’inflation de la zone euro est encore tombé à 0,2% en février dernier et le docteur Draghi n’a plus de remède. De quoi remettre en cause l’efficacité de la politique monétaire et - plus grave encore - la légitimité de la banque centrale.
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Mario Draghi, président de la BCE |
On ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif
Rappelons-le d’abord, la Banque Centrale Européenne est une institution chargée par les Etats membres de la zone euro de définir les grandes orientations de politique monétaire et de prendre les décisions nécessaires à sa mise en oeuvre : c’est-à-dire de maintenir le pouvoir d'achat de l'euro et donc la stabilité des prix. Sa mission principale, notamment, est de maintenir l’inflation, soit l’augmentation générale des prix, « au-dessous, mais à un niveau proche, de 2 % sur le moyen terme. » Pour cela, la BCE a recours à une panoplie d’instruments tels que la variation des taux d’intérêts ou celle de la masse monétaire en circulation. Une fois cette précision faite, il est temps de constater l’inquiétante stérilité des mesures prises par M.Draghi.
En juillet 2012 déjà, Mario Draghi avait calmé les agitations des investisseurs quant à l’avenir de la zone euro, en indiquant qu’il était prêt à faire « whatever it takes », c’est-à-dire tout ce qui est nécessaire pour la sauver. Il a alors choisi de passer le taux de prêt de la BCE à 0,05 % , c’est-à-dire quasiment nul, pour inciter les banques à emprunter et faire circuler la monnaie. De même, le taux de dépôts est tombé à - 0,4 % , c’est-à-dire que la BCE taxe les dépôts des banques, afin de les forcer à prêter cet argent aux entreprises et aux ménages, ou le placer sur des titres rémunérateurs à l’étranger. En fait, depuis longtemps déjà, la BCE s’attache à la doctrine keynésienne qui préconise de hausser la quantité de la monnaie en circulation, provoquant l’augmentation de la demande globale et générant de l’inflation. Avant de contester le fondement de cette théorie économique, il nous faut observer que, dans le cas de la BCE, elle ne porte pas ses fruits.