La politique française et les rapports
qu’en font les médias sont actuellement nauséabonds, préjugés et arguments ad
hominem rendant impossible un véritable débat d’idées, une réelle critique des
points faibles des programmes. Qu’est-ce qui a changé, quelles sont les causes
de cette cristallisation des opinions qui paralyse le débat politique ?
La caricature des adversaires politiques,
une attaque contre la démocratie
Certains hommes politiques s’étonnent niaisement de la
percée de l’extrême-droite et n’y observent que la preuve du racisme ou de la
bêtise d’un tiers de la population, préférant se noyer dans la fange de leur
propre ignorance plutôt que d’affronter le bilan sévère de leur conduite :
ils ont une grande part de responsabilité dans cette polarisation du monde politique
français.
Certes, on ne peut leur reprocher de ne pas avoir suffisamment
critiqué l’extrême-droite : « Le vote FN chez les jeunes est une
déviance » (C. Taubira, 29 septembre 2016), « Le fascisme rampant de Mme
Le Pen » (V. Peillon, 3 janvier 2017). Pourtant, ce n’est pas avec des
jugements provocateurs mais avec des arguments raisonnables que la société
progresse vers un bien commun. Caricaturer une partie de la population s’avère
utile pour gagner à court terme une élection, mais cela contribue à polariser
radicalement la société, puisqu’une telle attitude rend impossible un dialogue
constructif -c’est une attitude anti-démocratique. En effet, la polarisation de
la société entraîne ce que Tocqueville nommait « la tyrannie de la
majorité » (De la démocratie en
Amérique), c’est-à-dire que s’il n’y a plus de coopération dans le domaine
politique, le groupe majoritaire possède un pouvoir démesuré sur le reste des
citoyens -il peut ainsi rendre leur opinion illégale, par exemple.
En outre, les jugements pétris de bêtises et de préjugés
ne sont pas formulés uniquement contre des partis, mais aussi contre des
catégories de citoyens en raison de leur avis sur une question sociale ou bien
de leurs conditions de vie. Laurent Wauquiez (LR), dans ses très nombreuses
déclarations sur ceux qu’ils nomment les « assistés » - le 8 mai 2011,
sur BFM-TV, il dénonce « l’assistanat » comme « le cancer
de la société française » - participe à la marginalisation des personnes
sans emploi, alors même que le RSA ne représente que 2,5% du budget française
en 2016 et que parmi ses bénéficiaires, une minorité extrêmement faible profite
réellement du système.

L'écoute et le respect, conditions nécessaires au débat public
Quand Jacques Chirac dénonce en l’UDF le « parti de
l’étranger » lors de l’appel de Cochin du 6 décembre 1978, il dresse bien
une caricature d’un parti pourtant proche de ses propres convictions. Ce n'est donc pas un phénomène nouveau Néanmoins,
l’irrespect envers les adversaires politiques est en hausse depuis quelques
années, et ce bien souvent à des fins électorales. Les années 1930
constituaient aussi une époque où le climat politique était détestable -le
Maréchal Pétain déclarant que « l’esprit de jouissance l’a emporté sur l’esprit
de sacrifice » à cause du Front Populaire, le 20 juin 1940 – et il ne faut
pas refaire les mêmes erreurs.
Il est donc nécessaire d’éviter les arguments ad hominem
et les préjugés qui masquent les idées et le véritable débat de fond nécessaire
à un bon gouvernement de la nation. Les journalistes qui relaient ces
informations ont également leur part de responsabilité, privilégiant trop
souvent l’acharnement médiatique aux idées -ce qui favorise l’extrémisme. La
tolérance contient à la fois le respect et l’écoute. Le respect envers les
adversaires politiques, car le dénigrement radicalise, et l’écoute pour que la
vérité et le bien commun puissent être approchés dans un même effort collectif.
Paraphrasant Valéry Giscard d’Estaing, osons affirmer : « Vous
n’avez pas le monopole de la tolérance ! » à ceux qui caricaturent
trop vite les opinions et évitent le débat de fond.
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